Des consultations publiques sur le projet de loi 85 avaient lieu cette semaine à Québec. Le PL85 a pour objectif l’« allègement du fardeau réglementaire et administratif » des entreprises, et modifie à cette fin différentes lois qui encadrent leurs activités. Il élimine notamment la limite de quatre employés à laquelle devaient se conformer les épiceries et les pharmacies en semaine après 21h et après 17 h la fin de semaine.
De nombreux propriétaires de dépanneurs s’insurgent contre cette modification qui avantagerait selon eux les grandes surfaces, qui seraient alors plus enclines à étendre leurs heures d’ouverture, faisant ainsi concurrence aux petits détaillants, mais avec des moyens bien plus grands. Les TUAC 500, un syndicat qui représente des milliers de travailleurs et de travailleuses du commerce de détail, s’inquiètent pour leur part des répercussions de cette nouvelle disposition sur les jeunes, qui seraient alors encouragés à travailler le soir ou la nuit, au détriment de leurs résultats scolaires.
À ces craintes légitimes, il faut ajouter que cette proposition du gouvernement Legault est surprenante alors que la main-d’œuvre se fait encore rare dans le commerce de détail. Il y avait au Québec 11 960 postes vacants dans cette industrie au 3e trimestre de 2024. Permettre aux épiceries et aux pharmacies d’opérer avec plus d’employé·e·s en dehors des heures légales va encourager ces établissements à ouvrir de nouveaux postes qu’ils pourraient pourtant avoir de la difficulté à pourvoir.
Plutôt que de chercher à offrir une expérience de magasinage 24h sur 24 à la clientèle, pourquoi ne pas investir dans l’amélioration des conditions de travail des employé·e·s déjà en poste? On pense au premier chef à des augmentations salariales, considérant qu’au Québec en 2023, la rémunération horaire moyenne était de seulement 19,82$ dans les épiceries et les dépanneurs, contre 30,14$ pour l’ensemble des industries (en dollars courants).
Des améliorations ergonomiques pourraient aussi être apportées pour remédier aux souffrances invisibles des personnes œuvrant dans ce secteur, comme le suggère le Conseil d’intervention pour l’accès des femmes au travail qui s’est intéressé plus particulièrement au métier de caissière. Après tout, et comme on l’a vu durant la pandémie, il s’agit de travailleuses et de travailleurs essentiels.