Le bilan peu reluisant de Brian Mulroney
Le décès de l’ancien premier ministre du Canada Brian Mulroney a été souligné par de nombreuses personnalités publiques qui ont rendu hommage à l’homme politique et son imposant legs. Parmi les accomplissements qui ont été salués, on note la signature de l’accord de libre-échange canado-américain (ALE), l’opposition au régime sud-africain d’apartheid puis, en matière environnementale, la conclusion de l’Accord sur les pluies acides.
La disparition de cet éminent politicien conservateur donne toutefois l’occasion de se souvenir des reculs survenus durant ses deux mandats à la tête du pays et de prendre la mesure des conséquences délétères que peuvent avoir des politiques publiques sur le tissu social et économique d’une nation, et ce bien des années après leur adoption.
L’ALE, qui a ouvert la porte à la négociation de l’Accord de libre-échange nord-américain, a participé à fragiliser les conditions de travail sur le continent et à miner la souveraineté des États face aux entreprises privées. La privatisation de plusieurs entreprises publiques a éloigné l’État de certains secteurs économiques stratégiques. L’introduction de la taxe sur les produits et services (TPS) a marqué un virage régressif dans le cadre fiscal canadien. Le resserrement des critères d’admissibilité à l’assurance-chômage et les coupes dans le financement du programme ont concouru à la précarisation des travailleurs et des travailleuses. Quant à la fin du financement fédéral du logement social, qui explique en partie le déficit actuel de logements à prix modeste, il s’agit d’un des préludes à la crise du logement qui sévit au pays. Mentionnons par ailleurs qu’en bon conservateur, l’avocat de formation a aussi tenté de criminaliser à nouveau l’avortement après que la Cour suprême eut invalidé la disposition du Code criminel qui niait ce droit fondamental aux femmes.
En somme, à travers son parti pris net pour le libre marché, Brian Mulroney a avant tout contribué à la dérégulation de l’économie canadienne, faisant de lui une figure importante du néolibéralisme aux côtés de Margaret Thatcher et de Ronald Reagan. Le fait qu’on peine à reconnaître cet héritage en dit long sur la prégnance de ce courant d’idées au Québec et au Canada.