Pas de retour précipité au déficit zéro: une bonne nouvelle (IRIS)

Pas de retour précipité au déficit zéro: une bonne nouvelle
une bonne nouvelle
Le ministre des Finances Eric Girard a déposé hier son sixième budget du Québec marqué par un nouveau plan de retour à l’équilibre budgétaire désormais prévu pour 2029-2030.

« Repousser l’atteinte de l’équilibre budgétaire se justifie très bien, surtout en période de ralentissement économique. Nous gagnerions cependant à aller plus loin et revoir une fois pour toute la Loi sur l’équilibre budgétaire afin de relâcher davantage l’étau sur les finances publiques, par exemple en enlevant toute référence à un échéancier de retour à l’équilibre budgétaire et en laissant à l’Assemblée nationale le soin de se prononcer démocratiquement sur cet enjeu » estime Julia Posca, chercheuse à l’IRIS.

Portrait artificiellement assombri des finances publiques

De nombreux·ses observateurs·trices s’inquiètent du déficit plus élevé qu’anticipé, qui atteindra 11,0 G$ en 2024-2025 selon le gouvernement. 20 % du déficit actuel s’explique par le versement au Fonds des générations qui sera de 2,2 G$ cette année.

« Depuis l’adoption en 2006 de la Loi sur la réduction de la dette, on considère que les versements au Fonds des générations – pourtant un actif financier – constituent une dépense qui vient creuser notre déficit. Nulle part ailleurs, à notre connaissance, on n’évalue l’état de santé d’un budget après l’avoir excessivement noirci comme on le fait au Québec. Dans les faits, le bilan des finances publiques n’est pas dramatique au vu de la situation économique récente », explique Julia Posca.

Au moins 30 % du déficit aurait pu être évité

En raison des allègements fiscaux annoncés par la CAQ dans les dernières années, le gouvernement se privera d’approximativement 2,7 G $ en 2024-2025, ce qui représente 31 % du déficit lié aux activités sur l’horizon du cadre financier.

« Le gouvernement a choisi l’an dernier d’accorder d’importants allègements fiscaux aux entreprises et aux particuliers. On ne peut donc pas s’étonner que le budget 2024-2025 accuse un déficit annuel plus important cette année », remarque Eve-Lyne Couturier, chercheuse à l’IRIS.

Services publics : maintenir minimalement les services

« On ne peut qualifier le budget de “trop généreux”, car la croissance des dépenses prévues cette année sert essentiellement à compenser pour des années de sous-financement dans les services publics », précise Julia Posca.

L’IRIS a notamment calculé que les dépenses dans le système d’éducation doivent augmenter d’au moins 7 % pour suivre la croissance des coûts. Le budget 2024-2025 prévoit une hausse de 7,6%. « La croissance des dépenses en éducation, ce n’est pas du luxe, mais le minimum requis pour maintenir les services qui sont déjà en très mauvais état ».

Transport : la part du lion au réseau routier

Tandis que le plan québécois des infrastructures bonifie de 10 % les sommes allouées au réseau routier pour la période 2024-2034, les montants accordés au transport collectif ne sont augmentés que de 0,29 %.

« Le budget déposé aujourd’hui nous éloigne de la cible de parité entre les investissements affectés au réseau routier et au transport collectif. Le sous-financement chronique du transport en commun est désormais la marque de commerce de ce gouvernement », déplore Colin Pratte, chercheur à l’IRIS.

À la veille d’un nouveau cycle d’austérité ?

À travers ses mesures d’optimisation d’action de l’État, le gouvernement crée les conditions parfaites pour plonger les finances publiques dans un nouveau cycle d’austérité. Selon Julia Posca, « il est opportun de faire le ménage dans les aides fiscales offertes aux entreprises et aux particuliers. Or, l’ambition du gouvernement de réduire son déficit en coupant dans les dépenses des ministères et des organismes gouvernementaux n’augure rien de bon pour les services à la population, qui se remettent à peine du choc de la pandémie. »

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