On apprenait mardi que l’Indice des prix à la consommation avait connu au Canada une progression sur un an de 2,8% en février. L’inflation se maintient ainsi dans la fourchette de 1% à 3% que la Banque du Canada se donne comme cible pour guider sa politique monétaire. Moins de deux semaines auparavant, la banque centrale avait maintenu inchangé le taux directeur à 5,00%, territoire où il se situe depuis le 12 juillet 2023. Le Conseil de direction de l’institution avait alors justifié sa décision en affirmant être « préoccupé par les risques entourant les perspectives d’inflation ».
Rappelons qu’entre février 2022 et juillet 2023, la Banque du Canada a fait passer son taux directeur de 0,5% à 5%, un niveau qu’il n’avait pas atteint depuis avril 2001. L’objectif de cette mesure: faire croître le coût des emprunts afin de limiter la consommation et ainsi exercer une pression à la baisse sur les prix.
On pourrait conclure que le ralentissement de l’inflation est le résultat de cette politique restrictive si ce n’est que les facteurs qui sont à l’origine de la récente poussée inflationniste sont hors du contrôle de la banque centrale. Chaînes d’approvisionnement paralysées par la pandémie de COVID-19, effets de la guerre en Ukraine et d’événements climatiques extrêmes sur les prix des aliments, conséquences des décisions des pays producteurs de pétrole et de gaz sur les coûts de l’énergie, hausse des profits des grandes entreprises du secteur de l’alimentation… La stabilisation (toute relative, il va sans dire) de ces différents phénomènes a fait ralentir le rythme d’augmentation des prix depuis 2023.
La banque centrale influence cependant encore fortement le niveau des intérêts que les ménages détenteurs d’une dette hypothécaire doivent verser à leurs créanciers. La hausse du taux directeur a fait croître ces paiements et, partant, le ratio du service de la dette des ménages canadiens, qui a atteint 15% au 4e trimestre de 2023. On se trouve dès lors devant un double paradoxe: d’une part, la Banque du Canada contribue à l’inflation qu’elle a le mandat de combattre; d’autre part, l’institution considère le niveau élevé d’endettement des ménages qui en résulte comme un indicateur de vulnérabilités financières.
La prochaine révision par la banque centrale du taux directeur aura lieu le 10 avril. Espérons qu’elle commencera à relâcher l’étau pour le bénéfice non seulement des personnes endettées, mais de l’ensemble de l’économie canadienne qui a jusqu’ici échappé à la récession.